Trauma, honte et culpabilité,
Voies sacrées de reconnexion et de guérison
Partie 2
Voici le témoignage
« En dépit de tout ce que j’avais pu entreprendre, comprendre, exprimer, une part de mon passé restait inexorablement douloureuse, une part qui continuait à me faire apparaître à mes yeux comme un monstre, sans rédemption possible, justifiant que je me jette, oubliée de tous, dans une décharge, ou quelque chose de ce genre. L’ampleur de cette douleur était telle que je n’en trouvais pas le fond ni les contours, mon désespoir et mon impuissance étaient océaniques. Lorsque j’en parlais aux personnes les plus proches de moi ou les plus « habilitées », je réalisais bien que personne ne comprenait les raisons d’une telle détresse. Ces raisons m’échappaient aussi.
Cette part de mon passé était ma relation à mon enfant, et ce depuis sa conception. Cet enfant devenu adulte « réussissait » sa vie, et en apparence, correspondait à ce que j’avais dû souhaiter qu’il soit : un grand jeune homme, élégant, mesuré, extrêmement responsable, exigeant, respectueux, intelligent, drôle… (Il n’était pas que cela, bien sûr.) Si je contemplais sa vie ou ce qu’il m’en laissait connaître, je me sentais étrangère à ses succès, et coupable de ses « failles », de ce qui me semblait manquer à son accomplissement. Il suffisait que je lise un livre sur l’enfance, le rôle des parents, particulièrement celui de la mère, pour entrer dans des états de détresse. Je me repassais en boucle les pires souvenirs, ceux où j’avais manqué à tout ce que j’aurais voulu être pour lui. J’étais inconsolable.
J’avais désiré ce bébé pour me donner un futur, un rôle, une place, car je ne me l’expliquais pas mais, prendre ma vie en mains comme toutes les autres personnes semblaient simplement le faire, était hors de ma portée. Centrée sur moi et mes besoins, je n’avais pas su accueillir cet enfant lorsqu’il était dans mon ventre, je n’avais pas pris soin de me nourrir et donc de le nourrir. Nous avions tous deux frôlé la catastrophe, lui en souffrance fœtale, moi absolument inconsciente des risques que je nous avais fait encourir et que la sage-femme m’avait exposé après la mise au monde par césarienne. Lorsqu’il avait été là, ce bébé m’avait bouleversée et retournée d’amour. Mais je n’avais pas su m’ouvrir à lui, à sa présence et à ses besoins réels. Je m’étais retrouvée à chercher encore comment faire pour qu’il « m’envahisse » le moins possible.
Cela avait continué toute son enfance dont je m’étais rendue de plus en plus absente, faisant le choix de développer une carrière professionnelle et de m’épanouir en dehors de ma famille. En cloisonnant mon rôle de mère et en le séparant du reste de ma vie « personnelle », j’avais exclu mon fils physiquement et énergétiquement, le maintenant à distance de moi.
Les années passant, j’avais une conscience aiguë de mes manquements, de mon incapacité à traduire mon amour en actions et à donner du temps à ce qui avait le plus de prix à mes yeux. Mon enfant était le cœur de mon cœur, mais c’était à tout autre chose que je consacrais mon temps et mon énergie. C’était un déchirement permanent. J’espérais secrètement et follement que l’âme de cet enfant comprenne ce que je vivais et me pardonne.
Durant toutes ces années et encore après que mon fils soit parti de la maison, je revenais sur ce sujet douloureux lors d’accompagnements thérapeutiques. Parfois je glissais dessus en ressentant puis en fuyant bien vite le resserrement dans mon cœur, d’autres fois, je choisissais de le prendre à bras le corps, avec la décision de me sortir de ces regrets, de cette honte.
Un jour est arrivé où, à force de répétitions, j’ai fini par voir les boucles que mon esprit coupable faisait et qu’il pourrait faire ma vie entière. J’ai vu que je voulais me punir car j’avais échoué à respecter ce qui avait le plus de valeur à mes yeux : faire passer mon enfant avant mes besoins « égocentriques ».
J’ai pensé alors à mon fils : qu’avait-il vécu avec moi ? Comment me percevait-il aujourd’hui ? Que gardait-il de sa relation avec moi ? J’ai soudain compris que je n’allais pas lâcher cette culpabilité car étrangement, elle avait un sens, une raison. Lesquels ? À quoi me servait-elle ? Je l’ai perçue alors comme un trait d’union en suspend, s’élançant ardemment de moi vers lui, en tentatives répétées… Un désir vital qu’il sache et comprenne… mais quoi ? Que j’avais été une mauvaise mère… ? Que je m’en sentais coupable… ?
Non, je voulais qu’il sache que j’étais profondément malheureuse de n’avoir jamais su, selon mon estimation, lui montrer par mes actions qu’il était ce qui m’était le plus précieux au monde. Je voulais absolument qu’il sache cela, qu’il avait été, était encore et pour toujours, l’être que j’aimais le plus sur cette terre, et que j’aurais voulu lui donner beaucoup, beaucoup plus, et mieux que ce que je n’avais été en mesure de faire.
Il me restait à le lui dire, ce que j’ai fait.
Cette découverte et l’instant d’amour et de reconnexion vécu en lui parlant ont libéré un grand pan de notre relation. Mais une nouvelle étape m’attendait.
Peu à peu, certaines attaques contre moi-même sont revenues : le sentiment de honte, d’indignité, d’irréparable… Le chemin n’était pas fini.
Je ne voulais pas me faire croire que j’avais tout accompli parfaitement, je ne voulais même pas ne plus souffrir du tout en repensant à cette part de mon histoire. Je voulais trouver un rapport avec mon passé, qui soit basé sur le réel, dénué du drame qui amplifie, déforme et engloutit tout. »
La réalité de la vie
L’étape qui suivit fut celle de la prise en compte de la réalité de la vie, qui obéit à des lois se trouvant hors du champ de notre responsabilité individuelle. Voici quelques informations que gagneraient à connaître les personnes qui pensent qu’elles sont responsables de tout, qu’elles devraient être parfaites, et qui ont engrammé le besoin vital de tout contrôler :
- Les personnes ayant vécu des traumatismes adoptent des comportements qui blessent leur entourage et leurs enfants, c’est réel ; elles le font de façon involontaire, mais elles le font. Le Dr Gabor Maté, médecin, auteur et conférencier de renom, exprime ce fait simple, implacable, reconnaissant avec une transparence et une humilité infiniment touchante que cela a été son cas. Poser des mots sur une réalité peut atténuer le drame du regret et de l’impuissance de ne pouvoir revenir en arrière et changer ce qui a été.
- Une autre évidence relevant du simple bon sens est que, dans la première partie de notre vie, du fait des croyances issues de notre éducation, de nos traumas, de notre grande inexpérience, de la conscience limitée que nous avons de la vie et des relations… nous commettons de nombreuses erreurs et nous occasionnons des dégâts. Mais la sagesse veut qu’avec le temps, du travail sur soi, de l’introspection, les leçons apprises et l’épaisseur croissante de notre expérience, nous changions, nous devenions capables, dans la deuxième partie de notre vie, de nous comporter avec davantage de responsabilité et de prise en considération de nos vrais besoins et de ceux des autres.
Cette vision prend en compte le temps et l’évolution, notions qui peuvent échapper à un esprit fragmenté qui perçoit la vie comme linéaire, figée pour toujours dans un point de catastrophe. Les comportements désastreux des jeunes années sont des conséquences des traumas non résolus, et non la marque d’une monstruosité délibérée… Un parent ne peut pas avoir été complètement parfait, évitant miraculeusement de faire subir à ses enfants l’impact de ses blessures et de ses conditionnements inconscients. S’il avait été en mesure de le faire, il l’aurait fait, qui en pourrait en douter…
- Autre élément précieux à connaître pour un parent très marqué par son passé : le trauma n’a pas commencé avec lui, il a commencé des générations avant lui. Cet individu se trouve sur une chaine transgénérationnelle où les blessures se transmettent de parents à enfants par des ramifications inconsciences et l’incapacité d’exercer un choix dans lequel l’autre existe.
Enrichi de ces connaissances, le choix crucial devient : en prenant la responsabilité de la souffrance que nous avons occasionnée chez les autres, choisir de nous aimer en incluant tout – c’est-à-dire en nous prenant, sans condition.
Suite et fin (temporaire) du témoignage
« Grâce à la reconnaissance de ce qu’est la vie, sans que personne n’y puisse rien, un autre bloc de charge (la culpabilité inutile ! et la honte qui en découlait) s’est dissout. Un nouveau champ d’expression s’est ouvert devant moi : la possibilité jusque-là inexistante de parler avec mon fils, non pas depuis une condition de victime qui cherchait son pardon ou une certaine validation dans ce qui s’était passé. Mais depuis l’acceptation de ma responsabilité : il n’y avait pas eu de faute, mais il y avait eu souffrance, et elle était passée par moi, mes actions, mes négligences et mon absence. Je pouvais en parler alors, puisque mon auto-jugement écrasant n’était plus aux commandes. Ce qui l’avait remplacé, c’était la compréhension, la simple compréhension, et l’acceptation de la vérité. Je sentais que je voulais valider mon fils, valider l’enfant qu’il avait été et la souffrance qui avait été la sienne. Donner existence à ce qui jusque-là avait été enfoui dans le no man’s land du tabou et de l’impossible à dire. »
Pour clore
Être dans des relations vraies, communiquer avec vérité, être reçu et compris sont des besoins profonds et essentiels. Être reçu et entendu dans sa culpabilité est le besoin auquel ont longtemps répondu les prêtres (et encore aujourd’hui). Les cabinets de thérapie ont pris le relais.
La Clarification a fait de ce sujet une étape à part entière du processus de résolution de problèmes, de l’amélioration des relations et du chemin de croissance des personnes. Ses processus sont puissants et respectueux.
Comme je l’écrivais plus haut, la prise de responsabilité est le point de bascule. Simplement, les humains ont une telle peur de leur culpabilité qu’ils se hérissent et préfèrent l’enfouir… et ils se mettent à refuser toute notion de responsabilité. C’est très dommageable. Une aide est nécessaire. À partir du moment où vous l’aurez admis, vous vous rendrez compte que cette aide se trouve tout autour de vous, disponible, là pour vous.
Je vous souhaite un riche et beau chemin de libération, de ce tout ce qui vous entrave !
Séances de Clarification à distance ou en présence
06 29 93 15 31
Pour en savoir plus sur la Clarification : http://cathy-pascal.com
Sources :
– Les manuels de l’étudiant en Clarification (non publiés) de Charles Berner
– Notes issues de ma formation en Clarification – par Lawrence Noyes
– Dr Gabor Maté : interviews sur Youtube
– Mon expérience personnelle, mon expérience professionnelle de l’accompagnement des personnes en Clarification